Interview de Chahrazede BOULOUFA, chargée de pilotage et ordonnancement dans le secteur textile

Chahrazede BOULOUFA, 24 ans, possède un parcours technique et engagé dans l’univers de la mode et de la production textile. Après un BTS Métiers de la mode et du vêtement, puis une licence professionnelle MOD à Sorbonne Université en 2022, elle a enrichi son parcours avec des expériences chez Hermès et dans la production d’équipements pour les forces de l’ordre à Marck et Balsan. Tout au long de son évolution, elle est restée fidèle à sa passion pour la technique. Elle partage ici son parcours, son quotidien professionnel et ses conseils pour les futurs étudiants du secteur.
Pouvez-vous vous présenter, nous parler de votre parcours académique et de votre évolution professionnelle ?
Je m’appelle Chahrazede BOULOUFA, j’ai 24 ans, et j’ai suivi un parcours technique dans la mode dès le début. J’ai commencé en 2016 avec un bac pro métiers de la mode et du vêtement, où j’ai pu effectuer plusieurs stages, notamment en atelier, dont un en Erasmus. Après ce premier diplôme, j’ai poursuivi avec un BTS dans la même spécialité, enchaînant avec un stage dans une entreprise de supply externalisée, où j’ai travaillé pour des marques comme Gemo, Burton, Armand Thierry. J’ai tout de suite accroché à la logique de la supply chain et de la production.
C’est ce qui m’a poussée à intégrer la licence professionnelle MOD de Sorbonne Université, en alternance chez Alexandre Vauthier, une maison de luxe, toujours dans le secteur de la production. Ensuite, j’ai voulu me spécialiser davantage et j’ai intégré un master en management des produits de luxe, en alternance chez Hermès, au service prêt-à-porter femme, pendant deux ans.
Aujourd’hui, je suis en CDD dans une entreprise qui produit des équipements pour l’armée, la police et les pompiers. Je travaille dans le département textile avec un focus sur les uniformes. Et à partir de septembre, je reprends une formation en supply chain via un MBA en alternance, chez ETAM.
En quoi consiste votre métier aujourd’hui ?
Mon travail consiste à superviser les chaînes de production dans les usines. Le matin, je commence par faire le point sur ce qui a été produit la veille, puis je vérifie si de nouvelles commandes sont arrivées. Si c’est le cas, je consulte le service des achats pour m’assurer que nous avons tous les matériaux nécessaires : tissus, composants, etc. Si tout est prêt, je lance la production via un ERP, en consultant les stocks, en prévenant les ateliers, en négociant les délais, volumes, budgets, et en organisant les modalités de livraison. Ce processus se répète tout au long du cycle de production.
Quelles sont les qualités requises pour exercer ce métier ?
Il faut rester calme. La production, surtout en bout de chaîne, peut être stressante. Il faut aussi avoir un bon sens de la communication, car on échange avec de nombreux services : achats, approvisionnement, commerce, ateliers, fournisseurs… Il faut savoir adapter son discours selon l’interlocuteur. Et bien sûr, il faut être résistant au stress, notamment à la fin de la production, où l’on récupère tous les retards des étapes précédentes.
Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier ?
J’adore être en usine. J’ai une formation très technique, donc le contact avec les tissus, les machines spécifiques, les procédés industriels, c’est quelque chose qui me stimule énormément. A Marck et Balsan, c’est encore plus technique que chez Hermès : pour des uniformes de pompiers, par exemple, les tissus doivent être ignifugés, sans faille. C’est un autre niveau d’exigence. Et puis, ce qui me plaît aussi, c’est la variété des échanges avec tous les services. On est un peu le pivot du système, et j’aime beaucoup ce rôle.
Avez-vous un exemple de challenge rencontré dans votre métier ?
Oui, être en bout de chaîne, c’est un défi permanent. On passe après les stylistes, les achats, la création… Donc si un seul service prend du retard, c’est sur nous que ça retombe. Or, les usines ne sont pas des machines : ce sont des humains. On ne peut pas juste « aller plus vite ». Il faut aussi être diplomate pour annoncer aux décideurs que certains délais ne seront pas tenus.
Pourquoi avoir choisi la licence professionnelle MOD pour votre formation ?
Après mon BTS au lycée Elisa Lemonnier, ma professeure principale, qui avait monté la licence MOD, m’a suggéré de la rejoindre. Elle connaissait mon projet professionnel et savait que cette licence correspondait exactement à ce que je cherchais. Je ne connaissais pas du tout cette filière avant, c’était un hasard heureux et un concours de circonstances. Elle m’a vraiment guidée.
Qu’est-ce que cette licence vous a apporté ?
La licence MOD m’a permis de sortir du pur technique pour m’ouvrir à des aspects plus commerciaux et stratégiques : vente, marketing, gestion… Elle m’a donné une polyvalence que je n’avais pas avant. Je suis aujourd’hui capable de comprendre l’ensemble de la chaîne, du produit à sa distribution.
Quels sont vos projets pour l’avenir ?
J’aimerais poursuivre mes études en supply chain avec une nouvelle alternance chez ETAM, comme assistante chef de marché e-commerce. C’est un nouvel angle, une autre vision du métier, plus orientée commerce. J’ai envie de découvrir ce rôle que je ne connais pas encore. On verra ensuite selon comment l’alternance se passe.
Quel conseil donneriez-vous à un étudiant qui aimerait suivre votre voie ?
Écoutez vos professeurs. C’est grâce à l’une d’elles que je suis entrée dans cette licence, et grâce à Mme Melki que j’ai trouvé mon alternance. À la base, je voulais devenir ingénieure textile, aller à Roubaix après mon BTS. Avec du recul, je me rends compte que ce chemin ne m’aurait pas plu. Les enseignants ont souvent de très bons conseils. Parfois, il faut savoir leur faire confiance. Et surtout, il faut être curieux, se donner les moyens, et rester ouvert aux opportunités.